jeudi 9 octobre 2025

Unité du Corps-Esprit avec l'Univers

 Suite et fin du texte de Nishijima Roshi


Unité du corps et de l’esprit dans l’instant présent



D’ordinaire, nous pensons qu’il existe quelque chose que nous appelons « l’esprit » et autre chose que nous appelons « le corps », et que ces deux entités sont séparées, bien qu’elles exercent une grande influence l’une sur l’autre.


Dans le bouddhisme, nous considérons que le corps et l’esprit sont les deux faces d’une même réalité, que nous appelons « moi-même », mais que nous ne pouvons en vérité jamais saisir complètement.

Nous croyons que tout phénomène mental possède un aspect physique, et que tout phénomène physique possède un aspect mental.
Nous ne croyons pas à l’existence indépendante d’une entité appelée « esprit », séparée du corps physique, du cerveau, du système nerveux, etc.



Lorsque nous nous asseyons en zazen, puisque nous ne concentrons pas notre attention sur les pensées ou les perceptions, notre corps et notre esprit existent sans division, unifiés dans l’instant présent.


Lorsque notre esprit est dans son état ordinaire et que notre système nerveux autonome est équilibré, nous sommes dans l’état d’équilibre du corps et de l’esprit.


Unité avec l’univers

Lorsque nous pratiquons le zazen, non seulement pouvons-nous dire que le corps et l’esprit ne font qu’un, mais nous sommes aussi assis dans un état où il n’existe plus de distinction entre nous-mêmes et les circonstances extérieures — le monde qui nous entoure.


La plupart des gens ont, à un moment ou à un autre, fait l’expérience de ce simple sentiment d’unité avec toutes choses ; or, dans le zazen, nous pouvons remarquer qu’il ne s’agit pas seulement d’un sentiment, mais de l’état réel des choses, tel qu’il se manifeste dans l’instant présent.

Lorsque nous sommes assis en zazen, nous sommes un avec l’univers, et cet état englobe toutes les choses et tous les phénomènes.


En ce sens, bien que nous fassions l’expérience de cet état, nous ne pouvons pas le saisir intellectuellement. Nous ne pouvons pas le décrire de façon complète.


Nous appelons cet état « ineffable », ou « dharma », ou encore « vérité » ou « réalité ».
Mais même ces mots sont insuffisants pour décrire l’état simple et originel auquel nous revenons dans la pratique du zazen.


Harmoniser le corps — un système nerveux autonome équilibré

Dans le zazen, nous nous asseyons sur un coussin posé au sol, les deux jambes croisées, le bas du dos, le haut du dos et la tête tenus droits, verticalement alignés. Maintenir la colonne vertébrale droite a un effet direct et immédiat sur le système nerveux autonome, qui contrôle de nombreuses fonctions de notre corps. Ses effets incluent la régulation du rythme et de la force de contraction du cœur, la constriction et la dilatation des vaisseaux sanguins, la contraction et la relaxation des muscles lisses de divers organes, la capacité de focalisation des yeux et la taille des pupilles, ainsi que la sécrétion d’hormones par diverses glandes directement dans la circulation sanguine.





Le système nerveux autonome est composé de deux sous-systèmes : le système nerveux sympathique et le système nerveux parasympathique.

Lorsque le système sympathique est stimulé, notre rythme cardiaque augmente, les artères et les veines se contractent, les poumons se relâchent et les pupilles se dilatent ; en résumé, nous devenons tendus et vigilants.

Lorsque le système parasympathique est stimulé, c’est l’inverse qui se produit : le rythme cardiaque diminue, les artères et les veines se dilatent, les poumons se contractent et les pupilles se resserrent.

Lorsque le système sympathique est stimulé, notre rythme cardiaque augmente, les artères et les veines se contractent, les poumons se relâchent et les pupilles se dilatent ; en résumé, nous devenons tendus et vigilants.

Lorsque le système parasympathique est stimulé, c’est l’inverse qui se produit : le rythme cardiaque diminue, les artères et les veines se dilatent, les poumons se contractent et les pupilles se resserrent.

On voit donc que ces deux systèmes préparent le corps à une réponse active ou passive — ce qu’on appelle parfois le syndrome du « combat ou de la fuite ».

Lorsque l’effet des deux systèmes sur les organes est équilibré, nous ne sommes ni prêts à combattre, ni prêts à fuir ; nous sommes dans un état normal.

Les nerfs parasympathiques émergent de la moelle épinière à la base de la colonne (au niveau des deuxième, troisième et quatrième vertèbres sacrées) et à travers les vertèbres crâniennes du cou, tandis que les nerfs sympathiques émergent de la moelle épinière à travers les vertèbres situées au milieu du dos (des vertèbres T1 à L2).

Maintenir la colonne vertébrale normalement droite, avec la tête reposant bien d’aplomb sur le sommet de la colonne, minimise la compression des nerfs de ces deux systèmes aux points où ils émergent des vertèbres, et garantit un apport sanguin ininterrompu, leur permettant de fonctionner normalement.

Lorsque les systèmes parasympathique et sympathique fonctionnent tous deux correctement, ils agissent en opposition pour nous donner un état d’équilibre du corps et de l’esprit : ni trop tendu, ni trop relâché, ni trop optimiste ni trop pessimiste, ni trop agressif ni trop passif.
C’est cet état physique d’équilibre du système nerveux autonome qui engendre ce que nous appelons un corps-esprit équilibré.

De plus, s’asseoir dans une posture verticale, où la force de gravité agit le long de la colonne jusqu’au bassin, place le corps dans une position où ses réflexes peuvent fonctionner efficacement pour intégrer le fonctionnement de l’ensemble du corps.

jeudi 2 octobre 2025

Qu'est-ce que nous expérimentons en zazen ?

Vous trouverez ci-dessous la traduction d'un court texte de Nishijima Roshi intitulé qu'est-ce que nous expérimentons en zazen : 

Partie 1 C'est différent de la pensée ...

" L’état du zazen est sans intention et se distingue de la pensée. 

Cette affirmation peut sembler étrange, car nous avons l’habitude de croire que nous pensons sans arrêt. Pendant le zazen, nous évitons de suivre volontairement un enchaînement de pensées en nous concentrant sur le maintien de la posture. Bien sûr, des pensées et des images surgissent spontanément dans la conscience, mais elles n’ont pas d’importance. 

Lorsque nous remarquons que nous sommes en train de penser à quelque chose, il suffit simplement d’arrêter. Si nous corrigeons notre posture, la pensée ou l’image disparaît, la conscience s’éclaircit peu à peu et un sentiment de paix s’installe. Dans cet état paisible et équilibré, nous sommes dans cet état « différent de la pensée ».

Cependant, si nous cherchons intentionnellement à atteindre cet état différent de la pensée, nous ne pouvons jamais y parvenir. Quand, au cours du zazen, l’esprit est rempli de pensées et d’émotions, il faut le laisser tel qu’il est. Les préoccupations montent alors à la surface pour se dissiper dans l’univers. 

Ainsi, en revenant simplement à la posture, nous retrouvons naturellement notre état originel au fil de la pratique."

A suivre...

vendredi 5 septembre 2025

Genjo-Kôan : l'univers réalisé



En traduction moins littérale (et bien moins poétique) cela peut donner : 

Etudie toi-même; oublie toi toi-même, tu peux alors vivre l'harmonie avec tous les êtres et le cosmos; ainsi s'éprouve l'état où l'on s'est dépouillé des sensations et des cognitions et l'on expérimente un éveil sans trace de l'éveil.



dimanche 17 août 2025

Rentrée du Dojo Zen de Malemort le jeudi 4 septembre

Nous avons le plaisir de vous annoncer la reprise des méditations hebdomadaires (Zazen et enseignement) tous les les jeudis soirs (sauf moitié des vacances scolaires)  

Le jeudi 4 septembre à 20 heures (Merci d'arriver 10 minutes avant) 



Salle d'activité des APF / France Handicap, Impasse Tour de Loyre à Malemort.

Horaires inchangés : le jeudi de 20 heures à 21 heures 30.

Pour une première séance de découverte (possible toute l'année) contactez nous par mail (dogensangha.naq@gmail.com) ou par téléphone (Laurent - 06 52 63 41 42) pour une prise de rendez-vous pour une initiation 30 minutes avant le début de la séance.

Si possible, prévoyez une tenue sobre et confortable permettant de croiser les jambes et de respirer aisément. Les personnes ne pouvant pas pratiquer assir jambes croisées ou à genoux peuvent méditer sur une chaise dans une position adaptée.

jeudi 12 juin 2025

Bendowa partie 3 sur 3


 


Si quelqu’un demandait :

 

-               Les moines et nonnes qui abandonnent leur maison se libèrent d’un seul coup de tous leurs engagements, de sorte qu’il n’y a plus d’obstacle à leur pratique de Zazen et à la poursuite de la vérité. Comment un laïc accaparé par ses occupations peut-il pratiquer et être en unité avec l’état d’esprit sans intention de la vérité Bouddhiste?

 

Je dirais:

 

-                En règle générale, les Patriarches, débordants de générosité, ont laissé ouverte la vaste et grande porte de la compassion de manière à ce que tous les êtres vivants puissent expérimenter la vérité ; quel être humain ou quel dieu pourrait se refuser à y entrer ? Donc, lorsque nous parcourons le passé et le présent, nous en trouvons de nombreuses confirmations.

Par exemple, Daiso et Junso étaient, en tant qu’empereurs, extrêmement pris par les affaires d’Etat, mais il n’en ont pas moins poursuivi la vérité à travers l’assise en Zazen et ont réalisé la grande vérité des Patriarches Bouddhistes. Les ministres Li et Bo, seconds de l’empereur, étaient les bras et les jambes de la nation toute entière, mais ils n’en ont pas moins tous deux poursuivi la vérité à travers l’assise en Zazen et réalisé la grande vérité des Patriarches Bouddhistes.

Cette pratique-expérience s’appuie seulement sur la décision ou non de pratiquer ; elle ne dépend pas du fait que le corps quitte ou non la maison. Qui plus est, quiconque distingue profondément la qualité supérieure ou inférieure des choses aura naturellement la foi. Ceux qui pensent que les affaires du monde entravent en quelque manière le Dharma du Bouddha, dénient en fait l’existence du Dharma du Bouddha ; ils ignorent qu’il n’y a aucune existence qui puisse être considérée comme mondaine dans l’Éveil du Bouddha. Récemment en Chine il y eut un ministre du nom de Hyo, un officiel de haut rang qui avait réalisé la vérité des Patriarches. A la fin de sa vie il rédigea un poème où il s’exprima ainsi :

 

Lorsque les affaires officielles me le permettent, j’aime m’asseoir en Zazen.

J’ai rarement dormi le flanc sur un lit.

Bien que je sois maintenant devenu Premier Ministre,

Ma réputation de pratiquant chevronné s’est répandue au-delà des quatre mers.

 

Il s’agissait d’une personne qui n’avait aucun temps libre du fait de ses obligations officielles mais, du fait que sa détermination à pratiquer la Voie était profonde, il fut en mesure de réaliser la vérité. Nous devrions réfléchir et nous comparer à sa situation et à cette époque. En Chine parmi la génération présente de rois et de ministres, de nobles ou de roturiers, d’hommes comme de femmes, tous sans exception appliquent leur esprit à la vérité des Patriarches.

Les classes militaires autant que littéraires sont déterminées à pratiquer Zazen et à apprendre la vérité. Ceux qui s’y décident clarifieront sans doute pour la plupart l’Éveil. On peut donc naturellement en conclure que les affaires du monde n’obstruent nullement le Dharma du Bouddha. Lorsque l’authentique vérité se répand dans une nation les bouddhas et les dieux la protègent constamment, si bien que c’est un règne de paix. Lorsque le règne impérial est paisible, le Dharma du Bouddha se développe naturellement.

Lorsque Shakyamuni était de ce monde, même des personnes coupables de lourds péchés ou porteuses de vues erronées furent en mesure d’atteindre la vérité, et dans le sillage des maîtres anciens même des chasseurs ou de vieux bûcherons réalisèrent la Voie. Il est seulement nécessaire de rechercher l’enseignement et la réalisation auprès d’un maître authentique.

 

Si quelqu’un demandait :

 

-               Même dans le monde présentement corrompu de  dégénérescence du Dharma, est-il encore possible de réaliser la véritable expérience de l’Éveil en adoptant cette pratique ?

 

Je dirais:

 

-                Des intellectuels se sont préoccupés de telles conceptions, mais dans le véritable enseignement du Grand Véhicule, nous disons que tous ceux qui pratiquent atteignent la réalisation, sans discriminer entre le Dharma « juste », « imitatif » ou « dégénérescent ».

Dans ce véritable Dharma directement transmis, à la fois en y entrant et en en sortant, nous recevons le trésor de notre propre réalité. Ceux qui pratiquent peuvent naturellement savoir s’ils expérimentent réellement ou non l’Éveil, exactement comme quiconque puisant de l’eau est en mesure de dire si elle est froide ou chaude.

 

Si quelqu’un demandait :

 

-               Il a été dit que dans le Dharma du Bouddha une fois que nous avons clarifié le principe selon lequel l’esprit ici et maintenant est bouddha, même si notre bouche ne récite aucun sutra et que notre corps ne pratique pas la Voie du Bouddha, nous ne manquons de rien. Le simple fait de savoir que le Dharma du Bouddha demeure originellement en chacun de nous constitue l’achèvement complet de la vérité. Il n’y a aucun besoin de rechercher quoi que ce soit d’autre auprès d’une autre personne. Ne devrions-nous donc pas cesser de nous soucier de poursuivre la vérité en Zazen ?

 

Je dirais:

 

-               Voilà des propos extrêmement douteux. S’il en était comme vous le dites, comment une personne normalement intelligente pourrait-elle manquer de comprendre ce principe une fois qu’on lui aurait exposé ? Sachez que nous ne commençons à apprendre le Dharma du Bouddha que lorsque nous abandonnons les notions de sujet et d’objet. Si le fait de savoir que nous-mêmes sommes seulement bouddha pouvait être appelé réalisation de la vérité, Shakyamuni ne se serait pas soucié d’enseigner les préceptes par le passé. J’aimerais maintenant démontrer ceci à travers un exemple de sagesse subtile des anciens patriarches :

Il y a bien longtemps, dans la sangha de Maître Hogen, il y avait un moine appelé Soku. Son maître lui demanda :

« Révérend Soku, depuis combien de temps êtes-vous dans ma communauté ? »

 

Soku répondit : « Voici bientôt trois années déjà que je sers dans la communauté du Maître. »

 

Hogen : « Vous êtes un membre récent de notre communauté. Pourquoi ne me questionnez-vous jamais au sujet du Dharma du Bouddha ? »

 

Soku : « Maître, autant ne rien vous cacher : auparavant, lorsque j’étais dans la communauté de Maître Seiho, J’ai réalisé l’état de paix et de joie dans le Dharma du Bouddha. »

 

Hogen : « Quels sont les mots qui vous ont permis d’y entrer ? »

 

Soku : « Un jour j’ai demandé à Seiho : qui est ce disciple qui est moi ? Et Seiho répondit : les hommes de feu viennent à la recherche du feu. »

 

Hogen : « De bien belles paroles en effet. Mais j’ai peur que vous ne les ayiez pas comprises. »

 

Soku : « Les hommes de feu possèdent le feu. Donc j’ai compris que bien qu’étant de feu ils recherchent le feu, est une image de moi-même me cherchant moi-même.»

 

Hogen : « Maintenant je suis certain que vous n’avez rien compris. Si le Dharma du Bouddha était ainsi, il n’aurait jamais pu être transmis jusqu’à nos jours. »

 

A ces mots Soku se sentit soudain embarrassé et abattu, et il se mit en tête de quitter le temple. Mais en route il réfléchit: « Le Maître est reconnu dans tout le pays comme un bon guide et il est un grand responsable auprès de cinq cents personnes. Je dois admettre la valeur de sa critique.» Aussi il retourna auprès de son Maître pour admettre son erreur et s’excusa en se prosternant. Alors il demanda : « Qui est ce disciple qui est moi ? », et son Maître répondit : « Les hommes de feu viennent à la recherche du feu. ».

En entendant à nouveau cette phrase, Soku réalisa cette fois complètement le Dharma du Bouddha.

 

Il est bien évident que le Dharma du Bouddha n’est jamais atteint par la compréhension intellectuelle que nous sommes nous-mêmes bouddha. Si comprendre que nous sommes nous-mêmes bouddha était le Dharma du Bouddha, le Maître Zen n’aurait pas pu guider Soku, et il ne l’aurait pas admonesté ainsi. Dès notre première rencontre avec un véritable Maître, nous devrions uniquement et directement l’interroger sur les règles de la pratique, et poursuivre la vérité d’un seul esprit par l’assise en Zazen, sans permettre à une simple idée ou à une demi-compréhension de subsister. Alors la méthode subtile du Dharma du Bouddha ne sera pas pratiquée en vain.

 

Si quelqu’un demandait :

 

-               En Inde et en Chine, les gens sont naturellement humbles et sérieux, parce qu’ils sont au centre du monde civilisé; si bien que lorsqu’on leur enseigne le Dharma du Bouddha ils le comprennent et le pratiquent très rapidement. Dans notre pays, depuis les temps anciens les gens ont peu de sagesse et de bienveillance, et il nous est difficile d’accumuler les graines de la vérité, parce que nous sommes des sauvages et des barbares du sud-est. Comment ne pas le déplorer ? Même les moines de notre pays qui ont quitté leur maison sont inférieurs  aux laïcs des grandes nations. Toute notre société est stupide, et nos esprits étroits et faibles. Nous sommes profondément attachés aux résultats de nos efforts volontaires, et nous mettons en exergue des qualités superficielles. Est-ce que des personnes de la sorte peuvent tout de même espérer expérimenter directement le Dharma du Bouddha à travers l’assise en Zazen ?

 

Je dirais:

 

-               Comme vous le dites, les habitants de notre pays ne sont pas tous universellement bienveillants et sages, et certaines personnes en particulier sont même sûrement des brutes. Même si nous leur enseignons l’authentique et véritable Dharma, ils transformeront ce nectar en poison. Ils sont plus aisément dirigés par la recherche de la renommée et du gain, et il est difficile de dissoudre leurs illusions et leurs attachements. D’un autre côté, pour expérimenter le Dharma du Bouddha et y entrer, il n’est pas forcément nécessaire d’employer la sagesse universelle des êtres humains et des dieux pour manifester l’Éveil.

Lorsque le Bouddha était de ce monde, un vieux moine expérimenta le quatrième effet en étant frappé par une balle, et une prostituée clarifia la grande vérité après avoir revêtu un kesa ; tous deux étaient des personnes stupides, naïves et bornées. Mais avec l’aide de la foi juste, ils furent en mesure d’échapper à leurs illusions.

Une autre histoire célèbre est celle de la femme pieuse qui, en préparant le déjeuner, réalisa la Voie en apercevant un vieux moine idiot paisiblement assis. Ceci ne provint pas de sa propre sagesse, ni d’aucun écrit, ni d’aucune parole ou discussion ; elle fut libérée seulement par sa foi juste.

Les enseignements de Shakyamuni se sont répandus dans les trois mille mondes depuis environ deux mille ans. Les pays sont de toutes sortes ; toutes ne sont pas des nations de bienveillance et de sagesse. Comment d’ailleurs tous les gens pourraient-ils posséder à part égale l’intelligence et la sagesse ainsi que l’acuité de la vue et de l’ouïe ? Mais le véritable Dharma du Tathagata est doté originellement de vertus et de pouvoirs immenses et impensables, et le moment venu il se répandra dans tous ces pays. Lorsque quiconque pratique simplement avec la foi juste, les avisés comme les sots atteignent tout autant la vérité.

Ne pensez donc pas que, parce que notre pays n’est pas une nation de bienveillance et de sagesse et que les gens y sont obtus, il nous est impossible d’atteindre le Dharma du Bouddha. Tous les êtres humains détiennent en abondance les graines de la sagesse prajna. Il se peut simplement que comme seulement peu d’entre nous ont expérimenté directement l’Éveil, nous sommes immatures dans ce domaine.

 

Les questions se sont succédées dans une alternance désordonnées entre l’audience et le locuteur. Combien de fois ai-je fait fleurir d’inutiles abstractions ? Cependant, le principe fondamental de la poursuite de la vérité à travers l’assise en Zazen n’avait jamais été transmis dans ce pays ; quiconque le cherchait ardemment aurait autrement été déçu. C’est pourquoi j’ai l’intention de rassembler les quelques expériences que j’ai connues en Chine, et de transcrire les secrets d’un maître éveillé, de sorte qu’ils puissent être entendus par tout pratiquant qui le souhaite. J’y ajouterai plus tard les règles et les conventions des monastères et des temples, mais je manque de temps actuellement de temps pour les enseigner car elles nécessitent d’être exposées avec soin.

De manière générale, il est très heureux pour les habitants de notre pays que même si nous sommes séparés de la Chine par des nuages et des brumes, le Dharma du Bouddha se soit répandu vers nous depuis l’ouest. Cependant, la confusion entre idées et formes s’est accentuée, dérangeant la situation de la pratique. Désormais, parce que nous nous contentons de robes déguenillées et de bols recollés, liant le chaume pour pouvoir nous asseoir et pratiquer parmi les falaises bleues et les rochers blancs, la question de l’éveil ancestral du Bouddha apparaît enfin, et nous nous saisissons promptement de la grande affaire d’une vie de pratique. Ceci n’est que le sceau de la montagne Ryuge où vécut le successeur  de Tozan, et l’héritage du mont Kukkutapada où mourut Mahakashyapa. Les formes et les règles de l’assise en Zazen peuvent être pratiquées en suivant le fukan-zazengi que j’ai rédigé à l’ère Karoku.

 

Maintenant, pour répandre l’enseignement du Bouddha à travers toute une nation, d’un côté il semble que nous devrions attendre le décret royal, mais d’un autre côté si nous nous souvenons du sermon sur le Mont des Vautours, les rois, les nobles, les ministres et les généraux , des myriades de royaumes acceptèrent tous avec gratitude le décret du Bouddha et naquirent à nouveau pour accomplir le vœu de leurs vies antérieures consistant à protéger et maintenir l’enseignement du Bouddha. Dans cette expansion de l’enseignement, quel lieu pourrait ne pas être une terre de Bouddha ?  C’est pourquoi lorsque nous désirons répandre la vérité des patriarches Bouddhistes, il n’est pas toujours nécessaire de choisir un endroit en particulier ou d’attendre des circonstances favorables. Pourrions-nous simplement considérer ce jour comme point de départ ? J’ai donc rassemblé ces écrits, et je les laisse en héritage pour les maîtres judicieux qui aspirent au Dharma du Bouddha, et pour le fleuve des pratiquants sincères qui désirent explorer l’état de vérité, pareils à des nuages flottants ou des herbes dans le courant.

vendredi 16 mai 2025

La première maîtresse zen : Mugai Nyodai (1223-1298)

Mugai Nyodai (1223-1298) fut la première abbesse zen et la première maîtresse zen au monde. Comme il était d’usage pour tous les chefs monastiques de l’époque, une statue portrait fut réalisée la représentant, avec la tête rasée et les habits de moine. Cette statue fut sculptée vers la fin de sa vie, aux alentours de 1298 ; elle est aujourd’hui conservée dans le couvent Hōji-in à Kyōto.


Un simple coup d’œil peut donner l’impression qu’il s’agit d’une statue masculine ; mais un examen plus attentif révèle une femme au visage doux, les mains posées dans la posture contemplative propre au zen.

L’abbesse Mugai Nyodai fut une disciple et héritière spirituelle du moine chinois Wu-hsüeh Tsu-yüan (connu au Japon sous le nom de Mugaku Sogen ou Bukkō Kokushi, 1226–1286). Elle fut la fondatrice du couvent Keiaiji, temple principal du réseau des cinq grands couvents zen Rinzai. Elle est également considérée comme la matriarche spirituelle de nombreux couvents impériaux encore existants aujourd’hui.

La redécouverte de sa magnifique statue portrait grandeur nature, datant du XIIIe siècle, fut l’un des événements fondateurs qui attirèrent l’attention des chercheurs sur l’histoire institutionnelle bouddhiste du point de vue féminin, longtemps ignorée. Plus largement, cette redécouverte permit de mettre en lumière le rôle des femmes dans l’histoire religieuse japonaise.


Poème de l'Éveil de Chiyono (Mugai Nyodai)

Ainsi et de toutes les manières, j'ai tenté de réparer le vieux seau,
Espérant que les faibles bandes de bambou ne se briseraient pas.
Mais soudain, le fond est tombé :
Plus d'eau,
Plus de lune dans l'eau,
Et le vide dans mes mains !



Ce poème, souvent cité dans les anthologies zen, symbolise l'instant de l'éveil : lorsque le seau se brise, l'eau se répand et la lune, qui s'y reflétait, disparaît. Cette image illustre la dissolution soudaine de l'illusion et la réalisation de la vacuité.

Il existe également un autre poème offert en hommage à Mugai Nyodai par l'abbesse Kasanoin Jikun lors d'une cérémonie commémorative :

Vénérons ensemble
la lune brillante
d'un esprit poli
tout au long du voyage de la vie.

Ce poème, rédigé dans le style waka, souligne la clarté et la pureté de l'esprit atteint par Mugai Nyodai au cours de sa pratique.

dimanche 6 avril 2025

Vie et Mort

 L’eau ne se forme pas en étant versée dans un récipient. 

C’est simplement l’eau de tout l’Univers qui a été versée dans un récipient. 

L’eau ne disparaît pas lorsqu’elle est répandue sur le sol. 

C’est seulement l’eau de tout l’Univers qui a été rendue à l’Univers tout entier. 

La vie ne naît pas parce qu’une personne naît. 

C’est la vie de tout l’Univers qui a été versée dans cette "idée" figée appelée "moi". 

La vie ne disparaît pas parce qu’une personne meurt. 

C’est simplement la vie de tout l’Univers qui a été libérée de cette "idée" figée du "moi" pour retourner à l’Univers.

Kôshô Uchiyama



QUI SOMMES NOUS

Unité du Corps-Esprit avec l'Univers

  Suite et fin du texte de Nishijima Roshi Unité du corps et de l’esprit dans l’instant présent D’ordinaire, nous pensons qu’il existe quel...